Accompagnement musical
Il n’y a pas que les balades et
les chansons entraînantes de l’été pour nourrir l’âme… C’est bien beau un
instant, c’est bien enlevant sur la route des vacances, mais parfois il faut
revenir aux choses qui nous émeuvent, qui nous élèvent. Nourrir l’âme est un
impératif aussi important que l’apéritif.
Parler ou se laisser parler de
Naples, mérite mieux qu’Una notte a Napoli ou bien qu’une cigarette (Sigarette),
aussi bonne soit-elle. C’est pour cela que je vous propose donc le Stabat Mater (concerto en fa mineur… ce
choix de clef musicale n’est pas un choix innocent, il est là pour
l’introspection, il est là pour nous émouvoir, nous élever) de Giovanni Battista Draghi dit Pergolesi (Jean-Baptiste Pergolèse, en
français) – né à Jesi en 1710 – mort
à Pouzzoles en 1736, à juste 26 ans. Dommage! Cette œuvre aurait été créée (selon l’inscription sur la façade de
l’église Saint Ferdinand – chiesa di San
Fernandino) à Naples en 1736, année de sa mort, et depuis y a été interprétée
sans interruption tous les Vendredis saints. Juste pour cela, j’irais bien
faire mes prochaines Pâques à Naples (si seulement…). Ce concerto fait partie
de la liste courte des œuvres musicales que j’apporterais avec moi si je
m’exilais sur une île déserte (avec tout Bach et Haendel, avec des grands pans
de Mozart et de Vivaldi… pour les nombreux autres je choisirais à la pièce… mais
j’aurais besoin d’une très grande barque ou d’un iPod avec une capacité de
mémoire infinie). J’ai au moins sept versions de cette œuvre dans ma
discothèque. Je ne prétends pas avoir l’érudition, ni la collection d’Edgar
Fruitier, mais peut-être suis-je un petit Edgar campagnard quand vient le temps
d’écouter et de thésauriser le répertoire sacré et baroque. Aussi, le dilemme a
été de choisir quelle version vous proposer (et qui soit disponible sur
YouTube). Je vous avais déjà proposé une version dans ma page sur l’exposition Splendore a Venezia, comme miroir au Stabat Mater de Vivaldi car ces deux
œuvres magistrales s’équivalent par leurs beautés et leurs transports vers la
béatitude. Je n’ai pas pu choisir entre mes deux plus belles versions et le
résultat de ma recherche sur la toile. Je vous propose donc trois versions,
comme si nous étions en cours d’écoute musicale comparative. Faites l’exercice
de les écouter, les trois (au moins des extraits), et faites votre choix. Je
vous assure, ce ne sera pas du temps perdu, mais bien un cadeau que vous vous
ferez et une occasion de communier avec le divin :
- Version de Claudio Abbado, avec
le London Sympony Orchestra. Solistes :
Margaret Marshall (soprano) et Lucia Valentini Terrani (alto), 1985. Je verse
une larme ou deux à chaque écoute. Quelles voix magnifiques. C’est céleste ! On
ne peut pas ne pas ressentir la douleur de la Mater dolorosa. C’est un
monument au sacré et à l’émotion.
- Version de Christopher Hogwood avec The Academy of Ancient Music. Solistes
: Emma Kirby (soprano) et James Bowman (haute-contre), 1989. Aussi belle que la première, cette version a pour
avantage de proposer un duo de solistes composé d’une soprano et d’un haute-contre,
à défaut d’un castrat. C’est ce qui se rapproche le plus de ce que cela devait
être lors de la création de l’œuvre. La question à se poser est la
suivante : est-ce que le castrat chantait la partition de la soprano ou
bien de l’alto ? Il faudrait demander à Farinelli. Farce à part, ce qu’il faut
retenir de cette version c’est l’harmonie et le timbre exceptionnel des deux
voix. Je profite aussi de l’occasion pour souligner le magnifique travail et le
timbre de voix de James, une rareté et un précurseur pour l’époque.
- Cette œuvre céleste ne se démode pas (même Bach l’a
reprise et adaptée en allemand – le Psaume 51, BWV 1083) et l’engouement est
toujours très actuel… aussi, je vous propose une version beaucoup plus récente (magnifique
découverte pour moi) enregistrée au château de Fontainebleau (avril 2014) de Nathalie Stutzmann avec Orfeo 55. Solistes :
Emöke Baráth
(soprano) et Philippe Jaroussky (contre-ténor) – juste pour toi Joanne. Quelle
prise de son… quel équilibre entre les instruments et les voix. Quelle sublime
interprétation. BRAVO ! Nathalie nous propose une relecture fine et
personnelle (entre autres au début du premier aria « Cuius animam gementem ») qui me fait remettre en cause mon allégeance, jusqu’à ce jour inconditionnelle, à mes deux grands maîtres
que sont Claudio et Christopher (cette fois-ci, la France l’emporte sur
l’Angleterre). Si je vivais en France je m’abonnerais sans la moindre hésitation à leur série
de concerts.
Écoutez bien les différentes
versions, mais surtout n’oubliez pas de lire et regarder ce qui suit… mes
propositions d’accompagnement musical ne sont là que pour agrémenter votre
lecture de la page et non pas vous la faire oublier.
NAPLES
Comment
débuter le récit de mes (de nos) trois jours passés dans cette ville décatie,
plurielle et bourrée de trésors et d’histoire. J’ai essayé de vous la décrire en quelques
mots, en guise d’introduction. J’ai tenté quelques lignes, mais comme je cherchais
à vérifier si Naples avait une épithète (comme la Ville Éternelle, pour Rome ;
la Ville
Lumière, pour Paris ; etc.), j’ai relu les premières lignes d’introduction
que propose Le Routard. Je les ai trouvées plus appropriées et bien meilleures de
celles que je pourrais écrire. Permettez-moi de les citer :
« Cette ville dégage une identité folle : turbulente et
éruptive, à l’image du Vésuve découpé en toile de fond. Fantaisiste, dévergondée,
chahuteuse, Naples ne supporte pas l’hypocrisie et fait se côtoyer à chaque
instant le sacré et le profane, aristos et populos, grandeur et décadence. Camorra,
crise des déchets, chômage… ces maux endémiques alimentent encore et encore les
médias, et donnent des poussées d’eczéma à une Italie du Nord sûre de son fait.
Pour vous, voyageur, Naples est surtout une fascinante ville-musée à ciel
ouvert dont les habitants vous accueillent avec une spontanéité sans pareille. »
C’est
tellement vrai ! Bon, c’était notre deuxième séjour dans cette ville méridionale
d’Italie, mais cela faisait des lustres, vingt ans depuis notre première visite. C’était
comme si L’Autre et moi n’y étions jamais allés. Je me souviens des
consignes de sécurité aux voyageurs d’alors (faire attention de ne pas se
faire défoncer la voiture, de se faire voler dans la rue, etc.) qui nous avaient
fait voir, pressentir, la ville comme dangereuse (nous étions si gentiment naïfs
et néophytes !?!). C’est plus dégourdis et aguerris que nous y sommes revenus
cette année. Pour ma part, j’avais aussi dans mes bagages les souvenirs de mes
lectures plus ou moins récentes ayant Naples pour théâtre, comme par exemple :
- Harold
Acton :
Les Bourbons de Naples (pour l’histoire royale de la ville et pour en
apprendre sur la découverte d’Herculanum et de Pompéi) ;
- Erri de
Luca :
Le jour avant le bonheur et Montededio (romans proposant de vraies
tranches de vies napolitaines) ;
- Jean-Paul
Desprat : Jaune de Naples (pour les porcelaines de Capodimonte) ;
- Dominique
Fernandez : Dans la main de l’ange, Porporino ou les mystères de
Naples et Le Voyage d’Italie (dictionnaire
amoureux) (des incontournables pour qui aime Naples, le Mezzogiorno et l’Italie)
;
- Pier
Paolo Passolini : Les Ragazzi et Lettres luthériennes : petit traité
pédagogique (pas spécifiquement napolitain, mais en même temps si près)
;
- Roberto
Saviano : Gamorra – dans l’emprise de la camorra (pour comprendre
un peu plus cette gangrène qu’est la pègre locale) ; et enfin
- Jean-Noël
Schifano : Chroniques napolitaines (autres tranches de vies
napolitaines).
Cela peut
sembler un peu prétentieux comme bibliographie, mais cela ne m’a surtout pas
servi à épater L’Autre une fois sur place. Au demeurant ces lectures m’auront aidé,
un tant soit peu, à mettre en perspective ce foutoir qu’est Naples. Car, c’est
vrai, Naples
suppure et pue. Naples s’effrite et tombe en ruine. Oui, mais sa richesse est intérieure. Il faut passer outre la
déliquescence des lieux, s’avancer plus loin en son sein et ses alcôves. Vous
verrez, son âme s’y trouve. Naples est une émotion, une sensation, une lumière.
Nous n'y étions que pour 72 heures, mais nous en avons pleinement profité. Je
suis certain que vous aurez de la difficulté à croire que nous avons fait tout ce
que je m’apprête à vous raconter, à vous montrer.
Première journée
|
Je me présente humble et nu devant toi, belle du Sud.
Détail d'une fresque dans l'église San Giovanni a Carbonara. |
|
Nef de l'église San Giovanni a Carbonara
En effet, située juste de biais avec notre hôtel, nous avons débuté nos visites dans la ville
par l'ascension du double escalier tournant pour nous rendre dans cette église gothique
(très sobre de l'extérieur, mais très riche en tombeaux et mausolées en son sein). |
|
San Giovanni a Carbonara :
La chapelle Caracciolo di Vico. |
|
San Giovanni a Carbonara :
Détail du tombeau.
|
|
San Giovanni a Carbonara :
Cette chapelle (achevée en 1516) est un bel exemple d'architecture méridionale
fortement influencée par la Renaissance romaine.
|
|
San Giovanni a Carbonara :
Détail du pavement en marqueterie de marbre polychrome. |
|
San Giovanni a Carbonara :
Un teaser pour le Musée archéologique national à venir ? |
|
San Giovanni a Carbonara :
Détail du tombeau de Sergianni Caracciolo, dans la chapelle Caracciolo del Sole. |
|
San Giovanni a Carbonara :
Très beau pavement de majoliques (du XVe s.) de la chapelle Caracciollo... |
|
San Giovanni a Carbonara :
... et ses fresques consacrées à la vie de la Vierge. |
|
San Giovanni a Carbonara... une petite dernière :
Plafond d'une petite chapelle latérale qui annonce toutes les patines à venir. |
|
Juste en sortant de l'église San Giovanni a Carbonara. |
|
En montant vers l'église Dei Santi Apostoli (des Saints-Apôtres).
Pour quelle(s) raison(s) pensez-vous que j'ai pris cette photo ?
Pour la porte, les couleurs et les patines ou bien seulement pour montrer une scène de rue ?
Réponse : Pour toutes ces raisons. |
|
Parfois, on se heurte à un problème d'appréciation.
Pour y voir plus clair, il devient donc nécessaire de prendre du recul... |
|
... il faut aussi prendre son temps,
car y aller trop vite peut davantage compliquer notre compréhension, voire notre appréciation... |
|
... Est-ce du Street Art ou, si vous préférez, de l'art urbain ou, pour certain, déchet urbain ? |
|
Pour finalement comprendre et apprécier l'ironie.
Pour ceux et celles qui ne l'ont pas compris ou vu, il s'agit de la façade
du Liceo artistico statale (collège d'état pour les arts) !?! |
|
Le quartier regorge de patines et d'églises décaties, dont celle-ci (abandonnée),
Santa Maria Vertecoeli (SMV), donnant sur la ruelle du même nom. |
|
La nature reprend ses droits.
|
|
Le côté macabre prend différentes formes... |
|
... comme cette entrée aux enfers. |
|
Je ne pouvais pas non plus rater cette porte. |
|
Plus lumineuse, plus vibrante, l'église
baroque Santa Maria Donnaregina
qui fut édifiée au début
du XVIIe s. par les sœurs clarisses.
qui comprend aussi le monastère attenant.
|
|
Dans
l'antichambre du couvent :
Belle Madone à l'enfant et
surprenant semi-gisant à l'allure
rêvasseuse : pierre tombale de Carlo Loffredo
Geronimo d'Auria e bottega (XVIe – XVIIe s.)
|
|
Ange-gardien
Nicolò ou Niccolò ou Nicola
Fumo
(Saragnano
1647 – † Naples 1725)
|
|
San Camillo de Lellis
Peintre inconnu (XVIIe s.)
Je ne pouvais pas ne pas prendre une photo.
|
|
San Massimo
Giovan
Domenico Vinaccia
(Massalubrense
1625 – † Naples 1695) |
|
Santa Candida di Napoli
Giovan
Domenico Vinaccia
(Massalubrense
1625 – † Naples 1695)
|
|
Plafond du chœur de l'ancienne église.
On dirait presque des drapeaux américains ou britanniques. |
|
Détail du plafond à caissons de l'ancienne église. |
|
Détail des fresques de l'ancienne église. |
|
Grille du parloir au monastère des clarisses. |
|
Portes closes du monastère. |
|
Enfin dehors ! (dixit L'Autre)...
Un peu plus il m'aurait crucifié. |
|
Bon ! Bon ! on se calme le pompon.
Il n'y a pas que de l'art sacré à Naples, c'est aussi sapré contemporain,
Comme un jeu d'enfant de Daniel Buren, au Museo MADRE. |
|
C'était comme une bouffée d'air frais... |
|
... avant de retourner à la réalité... |
|
... et dans tout ce fatras. |
|
Mais je suis là pour toi et je t'aime. |
|
Vous vous souvenez de cette image ? Oui ? Non ?
Mais avec du recul, vous connaissez maintenant
quelle est la passion de Sophie.
Cela peut être pratique
en cas d’urgence. |
|
Les portes sont hautement colorées. |
|
Marchand de bric-à-brac ou débarras débordant sur la rue ? |
|
Ma tête ne tient qu'à un fil. |
|
Même le Christ se trouve à la rue. |
|
Toute une éruption de couleurs.
Est-ce un hommage de Raffo Art à l'œuvre d'Andy Warhol : Vesuvius,
exposée à la galerie de Capodimonte ? |
|
Les tomates en grappe de L'Autre qui me disait que nous en verrions partout à Naples.
Je pense que ce sont les seules que nous ayons vues. |
|
Il y a toujours quelque part un dragon à terrasser. |
|
Ici, le facteur n'a pas besoin de sonner deux fois ! |
|
Palazzo Spinelli di Laurino... ou du moins son fantôme. |
|
Je l'ai déjà dit : l'art urbain s'effrite, c'est un art fugitif et temporaire.
C'est souvent la même chose pour les installations contemporaines. |
|
Mi scusi! Qual è la direzione per il
Museo MADRE?
Pardon ! Quelle est la direction du Musée MADRE ?
|
|
Double autophoto
Je vais dorénavant utiliser ce terme plutôt qu'autoportrait (car je ne suis pas artiste peintre),
que selfie (terme que je déteste) ou
égoportrait (car loin de moi l'idée narcissique de me voir en portrait). |
|
C'est encore loin Venise ? |
|
Même devant la porte, nous ne l'avons pas franchie. |
|
Il était plus que temps de faire une pause pour recharger nos batteries. Leurs gelati sont divines et peuvent même ressusciter deux zombies par cette canicule. |
|
C'est rechargés à bloc que nous sommes repartis en trombe... |
|
... pour aller porter une rose... |
|
... à ces dames. |
|
Au secours ! |
|
Colonne de la peste près de la cathédrale (Duomo). |
|
Quelles belles coulures vertes. |
|
Porte à... |
|
... porte. |
|
Tiens ! il faudra revenir. |
|
Toc, toc, toc ! |
|
Bienvenue chez nous... |
|
L’église Saint Ferdinand – Un prélude pour un Vendredi saint... |
|
... et la sublime supplique de la Mater dolorosa. |
|
Toujours une porte... |
|
... et une autre.
On dirait un vrai chemin de croix. |
|
Rien de mieux qu'un vin « Vésuvien »... |
|
... pour accompagner une pizza de chez la Pizzeria Sorbillo, au 32 Via dei Tribunali, ne vous trompez pas d'adresse, car les cousins voisins lui font de la concurrence. |
|
Merci mon Dieu de m'avoir nourri. |
|
Un petit air de Venise ? |
|
Toutes ces boîtes aux lettres. |
|
Petit détour vers notre hôtel. |
|
Ça c'est une vraie mini |
|
Décharge de récupération devant notre havre de paix et de fraîcheur. |
|
Pensiez-vous que notre première journée (avec le décalage, la nuit blanche, la route en provenance de Rome et toutes nos visites) était terminée ?
Détrompez-vous, c'était le 15 juillet et nous voulions aller voir la fête de Santa Maria del Carmine :
grande fête populaire durant laquelle le campanile de l'église s'embrase à 22 H dans un simulacre d'incendie. |
|
À l'approche de l'église on sent la fête populaire à venir. |
|
Les derniers préparatifs de la fête.
C'est l'effervescence dans la sacristie. |
|
Le plafond de la sacristie. |
|
Plafond de l'église de Santa Maria del Carmine. |
|
Procession de début des cérémonies. |
|
Cette installation n'était pas là en prévision de l’« incendie » du campanile,
mais bien pour sa restauration.
La conséquence a été que nous n’avons eu droit qu’à un vrai pétard
mouillé en guise d’apothéose.
C’est un peu penauds et bien fatigués que nous sommes finalement allés nous coucher.
|
|
Et sur le chemin du retour vers l'hôtel, ce combat nous a semblé plus terrible la nuit tombée.
J'espère que nous ne ferons pas de cauchemars. |
Exit la première journée…
Ça promet pour le reste.
Naples, la ville de tous les superlatifs ! Ces premiers pas dans la ville nous en apprend beaucoup sur l'atmosphère qui y règne, ses merveilles mais aussi ses excès. Elle me fait l'effet d'un bijou précieux crado et négligé. Vivement la suite !
RépondreEffacer