Rien de mieux que l’opéra italien
pour accompagner vos balades dans la campagne des Pouilles car le décor est
tellement baroque et lyrique. Qui pense opéra et Mezzogiorno ne peut pas ne pas
évoquer l’âge d’or des castrats – une coutume ou, devrais-je plutôt dire, une pratique «mezzogiornienne » d'émasculation qui a eu cours durant une longue période (de la 2e moitié du XVIe
s. à la fin du XIXe / début XXes.)
– pensons par exemple àCarlo Broschidit« Farinelli »(1705 – † 1782),
chanteur pour Porpora, Vinci etHasse (jamais
pour Haendel, même si le film au titre éponyme deGérard Corbiau [1994] le
laisse croire, cette rencontre n’est que pure fiction), àGaetano
Majorano dit
« Caffarelli »
(1710 – † 1783), chanteur pour
Porpora, Hasse, Pergolesi et Haendel (cette fois-ci, c'est vrai), ou, pour les amateurs de littérature, àAntonio Uberti dit« Porporino »(1697
– † 1783), principal protagoniste du roman deDominique Fernandez :Porporino ou les Mystères de Naples (Grasset, 1974). Cette époque
est bien révolue, mais les magnifiques airs et opéras ont survécus jusqu’à nos
jours. Aujourd’hui, ce sont les contre-ténors qui ont le vent en poupe pour
reprendre à merveille ce répertoire. Vous le savez maintenant, j’aime bien Philippe Jaroussky (voir mes
propositions musicales précédentes : Naples
Jour 1,Naples Jour 2 et Splendore a Venezia), mais il n’est pas le seul à occuper le terrain. Il y a quelques
semaines j’ai découvert le magnifique enregistrement de Catone in Utica de Leonardo Vinci (Strongoli en Calabre 1690 – † Naples
1730) sur étiquette DECCA. Faute de n’avoir pu trouver sur YouTube l’ensemble de l’œuvre, je vous propose malgré tout trois courts extraits
interprétés par des contre-ténors provenant d’horizons divers, mais non italiens :
C'est toujours basés à Tarente que
nous avons poursuivi nos pérégrinations. Après une première excursion àAlberobelloet surtout àMartina Franca(Les Pouilles 1), la barre était haute pour satisfaire notre curiosité et
nos attentes. C’est en empruntant l’emprise de la Via Appia (voie Appienne), ancienne « autoroute »
romaine reliant Rome à la Grèce, que nous nous sommes rendus jusqu’à Brindisi, terminus de cette route et trait
d’union entre l’Occident et l’Orient. La tentation était grande de prendre le
traversier pour nous rendre à Corfou en Grèce, mais nous avons su résister aux
appels de la mer et à la douceur de cette île enchanteresse (microcosme d’Italie
et de Grèce auréolé de l’influence vénitienne), seulement quelques vagues réminiscences
d’un agréable séjour ancien sont remontées à la surface.
Point de farniente pour nous sur la
côte, après une courte visite de Brindisi, nous avons plutôt repris le chemin
des terres pour revenir vers Tarente en passant par Ostuniet Grottaglie. Petites
routes, petits villages et petites villes étaient au menu pour nous faire voir
la douceur de la campagne généreuse, pour nous faire goûter aux saveurs locales
et pour nous faire découvrir l’effervescence de l’artisanat et de l’art
régional.
Brindisi
Ville de passage, lorsque que vous
êtes en partance pour la Grèce, l’Albanie, ou l’ailleurs, Brindisi ne semble
pas a priori attrayante. C’est souvent
la fausse impression, le préjugé, qu’on a avant d’y être venu. L’image glauque
ou coupe-gorge qu’on a tendance à attribuer à ces vieux ports de transit est
tellement loin de la réalité, car Brindisi est devenue une ville pleine de
vitalité qui a su rénover ses monuments et musées et moderniser son
centre-ville (en parti piétonnier) et son bord de mer (avec quelques cafés,
bars et terrasses). Arrivés tôt le matin, L’Autre et moi y avons passé
quelques heures à nous promener sans attentes particulières, au gré de notre
curiosité (et ce sans guide ou programme de visites). Nos pas nous ont entre
autres amené à visiter la collection
archéologique S. Faldetta (et non pas le musée archéologique régional), à
prendre une pause sucrée au bar à chocolat de la Pasticceria Bernardi, à
faire un voyage dans le temps à l’époque des Templiers en allant visiter le Tempio
S. Giovanni al Sepolcro, petit édifice circulaire (comme le
Saint-Sépulcre) d’architecture normande (XIe s.). Ce fut bref, mais ce
fut bien et bon.
Copie de la colonne marquant la fin de la Via Appia.
En face, c'est le port interne où seuls les bateaux de plaisance s'y amarrent maintenant.
Ici aussi, l'influence de Venise s'est fait sentir. Un peu de crépit et de peinture feraient du bien.
Ici, un coup de brosse à récurer le rendrait moins triste.
Cratère attique à figures rouges et autres vases antiques
de la Collection S. Faldetta.
Venise en a inspiré beaucoup...
... à vous de juger du talent.
En se promenant dans le quartier du duomo.
Détail du Monument aux fils de Brindisi morts pour la patrie lors de la 1re Guerre mondiale.
Moi je vous le dit : "La guerre c'est pas jojo."
Linteau en marbre du portail de l'entrée du Tempio S. Giovanni al Sepolcro.
Fresques et détails architecturaux du temple circulaire.
Est-ce que ce Vendetta (avec le chiffre 1) est le premier indice ou le point de départ d'une chasse au trésor ?
Façade du palais nobiliaire (1565) de la famille Granafei Nervagna.
En prime, quelques beaux heurtoirs.
Ostuni
Avant d'arriver à Ostuni, cette « acropole » blanche perchée
au sommet d'un îlot entouré d'une mer d’oliviers à la frondaison d’un camaïeu
passant du vert foncé au vert clair argenté, nous avons fait un arrêt à San
Vito dei Normanni, bourgade agricole typique du Salento. Nous ne devions qu'y
faire un arrêt technique pour nous ravitailler en eau, mais heureux
hasard, nous sommes arrivés juste à temps pour voir à la sortie de l’église un
autre mariage (décidément, c’était la saison)… un peu plus et nous étions pour
être invités à la noce. À la place, nous avons pris quelques minutes pour nous promener dans les rues paisibles et quasi désertes, nous étions en plein pisolino
(l’heure de la sieste).
Revenons à Ostuni. De son passé byzantin puis angevin et aragonais la
cité, aux allures orientales, a conservé plusieurs fragments (tours et fortins)
de ses murailles qui entourent son bourg médiéval à la manière d’une couronne
de blancheur, comme si elle était taillée dans la craie. À s’y promener, on se
croirait dans une médina d’Afrique du Nord ou en Grèce, car ici le blanc et le
bleu sont omniprésents. Pas besoin de fil d’Ariane pour se retrouver dans le
dédale des petites rues, souvent pentues, de cette ville blanche agrémentée de
façades d’un gothique tardif en pierre dorée. Même si un tantinet trop
touristique, la visite de celle-ci et la tournée des boutiques et galeries nous ont révélé quelques belles
surprises. Je me suis même laissé tenter par de la confiture de citrons et par des tranches
d’orange confite. Je pensais conserver ces trésors gustatifs pour les partager
avec mes amies gastronomes, mais à défaut de leurs visites, je suis à manger
les dernières tranches d’orange confite pendant que j’écris les présentes
lignes. Elles sont effectivement délicieuses (Oups ! elles étaient, car il n’y
en n’a plus) et ont été, par ce jour pluvieux de décembre, un souvenir suave
des saveurs salentines. En somme, L’Autre
et moi avons bien aimé Ostuni.
San Vito dei Normanni –Intérieur de l'église Santa Maria della Victoria où avait lieu le mariage.
San Vito dei Normanni –L'origine...
... du carré deSan Vito – 1
La Volks à Vito, la Beetle peau de vache ou dalmatiens en cavale... À vous de choisir !
San Vito dei Normanni – Monument aux morts de San Vito, l'origine...
... du carré de San Vito – 2
San Vito dei Normanni – Poignées de porte pour s'évader, pour s'envoler.
San Vito dei Normanni –Belles persiennes.
San Vito dei Normanni –Des façades...
... revampées, patinées...
... ou endormies...
... et où on nous ferme les rideaux au nez pour faire la sieste...
... et moi, j'en profite pour tirer ma révérence sur ce scooter.
En route vers Ostuni, nous traversons une mer d'oliviers sur fond de terre rouge.
Ostuni –La ville blanche assise sur ses murailles.
Ostuni – Rue en escalier typique du bourg médiéval.
Ostuni –La cathédrale Santa Maria Assunta, de style gothique tardif, est très élégante avec son couronnement d'arcs concaves et convexes.
Cathédrale d'Ostuni –Magnifique rosace à transenne (sans vitraux) à 24 rayons.
Ostuni – Le largo Trinchera, placette qui fait face à la cathédrale est enjambée par une loggia baroque à arcades, l'Arco Scoppa (1750), qui relie le Palazzo vescovile (l'évêché) au Palazzo del Seminario.
Une galerie d'art donnait sur la placette...
Ce n'était pas l'heure de l'apéro, mais une discussion bien arrosée et très animée y avait lieu entre gens de classe... À savoir si...
… cette patine était bien l’œuvre de CamiloMondo.
Cette dame d'affirmer : "Je le sais moi. Non ! cette œuvre n'est pas un carré de CamiloMondo. Voilà !"...
Ces messieurs de rétorquer en cœur : "Assurément, elle n'est même pas carrée !?!" Note : Veillez m'excuser de ne pas vous donner les noms des artistes dont les œuvres ont servi pour la mise en scène de ma petite plaisanterie, car j'ai oublié de les noter. Mes excuses s'adressent aussi à eux. P.-S. : Si je n'avais pas appréciées les œuvres, je ne les aurais pas photographiées.
Ostuni – Derrière cette porte c'est la Grèce... ou presque.
En nous promenant partout dans la vieille ville...
nous avions réellement l'impression d'être ailleurs...
... sur la côte, même si celle-ci est à une dizaine de kilomètres.
Ici et là quelques signes pour nous rappeler que nous étions toujours en Italie.
Heurtoirs d'inspiration marine et égyptienne.
Beaucoup de petits passages pour susciter notre curiosité.
Un bleu "grec" omniprésent.
Un porte-à-porte fort agréable à faire.
Une petite note de rose dans tout ce blanc et ce doré de la pierre.
Ostuni est une ville de contraste et de mélange d'époques.
Même les chats par mimétisme se confondent avec le décor.
Il n'y a pas que le bleu...
... pour enjoliver les portes.
Heurtoir vert-de-grisé.
Façades des églises de San Francesco (à gauche) et de l'Esprit-Saint (à droite).
Zoom sur les détails d'une porte.
Traduction :"Buvez du vin à bon escient" À bon entendeur salut !... ou Santé !
Bruschetti et Aperol Spritz ou panini et Prosecco... Qui en veut ?
Après un tel festin, nous étions prêts à remonter l'Adriatique en gondole, jusqu'à Venise.
Une dernière porte et...
... un collage Street Art par Hopare pour nous dire au revoir.
Grottaglie
Il était déjà tard en fin d’après-midi
quand nous avons quitté Ostuni et il restait sur notre liste la visite de Grottaglie,
gros centre viticole, mais surtout connu pour sa fabrication artisanale de
céramiques d’usage quotidien. Je n’en titillais pas d’envie car j’avais peur
que ces céramiques soient à saveur trop « locale » et de les
rapporter chez-nous serait comme revenir du Mexique, en plein hiver, avec un
sombrero sur la tête… c’est « cute »
(c’est mignon) dans l’avion, mais « quétaine »
(ringard) et kitsch une fois rendu dans le stationnement de l’aéroport en train
de déneiger sa voiture… encore pire, voir celui-ci suspendu au porte-manteau de
l’entrée ou accroché au-dessus du manteau de cheminée dans votre maison. Mais comme
nous passions par-là, pourquoi ne pas y faire malgré tout un petit saut. J’avais
en partie raison, mais davantage tort d’avoir laissé mes angoisses esthétiques inhiber
ma curiosité et méjuger (sans avoir vu) les talents locaux. Je vais mettre ça
sur le dos de la fatigue. Il me semble que j’entends L’Autre dire : « La fatigue, la fatigue, mon œil ! C’est
plutôt son "écœurite" aiguë de la signalisation routière italienne sibylline et
déroutante – Oups ! L’Autre n’utiliserait pas ces deux
derniers mots, il dirait plutôt mélangeante, voire contradictoire quand
existante – qui lui fit perdre le nord… C’est
comme si mon GPS de copilote (CamiloMondo) était non fonctionnel. Ça c’est
frustrant en titi. » Bof, laissons-le dire, cela lui fait tellement
plaisir. Blague à part, nous avons été surpris et ravie à un point tel que nous
avons fait toutes les boutiques, tous les ateliers de céramiques du bourg et
même visité le musée de la céramique
dans l’ancien château des évêques de Tarente.
Tout un comité d'accueil.
Les pièces peuvent être polychromes ou, comme ici, monochromes et servir à différents usages.
Une des bonnes fabriques de céramiques qui sait mettre de l'avant sa production.
Dans leur cas, l'artisanat et devenu art magnifique.
Allez visiter leur sitepour voir leurs belles réalisations.
L'Autre aurait bien aimé en rapporter une, mais celles-ci, selon lui,
étaient nettement trop chères pour sa pauvre petite bourse.
Et moi de lui dire : "Vraiment ? Tu sais l'art n'a pas de prix."
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