Pas besoin de faire de détour, s’il
y a un compositeur qui est synonyme de la Finlande, c’est bien Jean Sibelius (1865-1957). Et Finlandia
(1899), une de ses nombreuses pièces symphoniques, probablement son œuvre la
plus connue, est devenue rapidement l’hymne officieux de la Finlande. (Pour
celles et ceux qui regardent ce blogue sur leur tablette, cliquez ici.)
HELSINKI
Bienvenue en Finlande, pays
scandinave le plus à l’est... Stop là !
me dit tout de go L’Autre : « On
se calme le pompon de la tuque ! La Finlande ne fait pas partie de la Scandinavie ».Euh ! Ah ! c’qu’il en dit des
sornettes L’Autre. Ben voyons donc, moi de lui répondre : « C’est sûr que la Finlande fait partie de la
Scandinavie, leur drapeau en fait foi ». Lui, de me répliquer : « Utilise-t-elle la Couronne comme
unité monétaire, ou bien l’Euro ? Et pourquoi donc ?» Homme de peu de
foi, que je suis, de ne pas croire dans les connaissances de L’Autre.
Car le cartographe entre nous deux, c’est moi ; le féru d’histoire, c’est
encore moi. Mais cette fois-ci, le plus con des deux, c’est moi ! Car il avait
raison, si l’on s’arrête à la définition stricte de la Scandinavie, qui ne
comprend que la Norvège et la Suède (les deux seuls pays se trouvant sur la
péninsule de Scandinavie). Si l’on se réfère à l’appellation la plus courante,
on ajoute le Danemark (car ce pays, à l’image des deux autres, partage une
histoire et une culture communes). Finalement, la Finlande, dans un sens plus
large, peut aussi être parfois associée à la Scandinavie (qui serait alors plus
juste d’appeler Fennoscandie), et comme peuvent l’être aussi l’Islande et les
Îles Féroé. Tous ces pays du septentrion m’ont fait perdre le nord ! Je
m’incline donc devant son savoir et je suis ravi de constater qu’il lui est
resté quelque chose de son premier séjour en Finlande. Aussi, je m’en remets complètement
à lui pour éclairer ma lanterne et pour combler mon ignorance virginale du pays
finnois.
J’avais hâte d’arriver le
vendredi matin à Helsinki, car c’était la seule journée de notre séjour, où la
météo nous prévoyait du soleil. Eh bien, après avoir survolé la mer Baltique et
le golfe de Finlande, au-dessus d’un coussin continu de nuages, nous avons
commencé notre descente vers l’aéroport d’Helsinki. Le plafond nuageux était
tellement bas, que nous avons aperçu la piste d’atterrissage qu’au dernier
moment. Bravo pour l’accueil ensoleillé ! L’Autre m’avait dit que l’aérogare
était très belle et tout de bois construite. J’avais beau chercher, mais aucun
parquet, aucune boiserie, aucune poutre en bois. Tout était de métal gris et de
surcroît un tantinet vieillot. Je ne savais peut-être pas que la Finlande ne
fait pas partie de la Scandinavie, mais je sais faire la différence entre le
bois et le métal. Cela promettait pour le reste du séjour, si mon guide est
déjà tout perdu, confondu, ou daltonien des matériaux. Une fois à bord de la
navette qui nous amène au centre d’Helsinki, le paysage se déroule sous nos
yeux, dans une palette de déclinaison de gris. Étions-nous tombés dans la ville
des Cinquante
nuances de Gris, excusez-moi, de Grey ? Ciel !, je mélange tout,
c’est la faute du décalage et de la nuit blanche !!!... Je disais donc, tout
était gris : la route, les véhicules, les bâtiments et immeubles, même les
squelettes spectraux des bouleaux sur le bord de la route. Les premiers
quartiers de la ville avaient peine à ajouter de petites notes de couleur, pour
égayer l’atmosphère. Il fallait avoir la foi, car c’est seulement une fois
rendu au centre de la ville que celle-ci s’animait et devenait multicolore.
Rendu à notre hôtel,
c’est là que nous avons constaté la chaleur de l’hospitalité finlandaise. En
effet, une fois entrée dans notre chambre nous avons été surpris de voir que
celle-ci comprenait un sauna privé, attenant à notre salle de bain (du jamais vu
dans les autres « vrais » pays scandinaves). Quel luxe et quel
plaisir de pouvoir profiter de celui-ci à notre convenance. Il était petit,
mais tout à fait spacieux (pouvant accueillir deux, voire trois personnes à la
fois), confortable et design. J’aimerais bien en avoir un semblable… et comme
les Finlandais, j’irais me saucer dans les eaux froides du fleuve devant
chez-moi, une fois que les pores de ma peau auraient été nettoyées de leurs toxines. Le
plaisir du sauna et des ablutions, que l’on y fait, me font devancer mes commentaires
sur le magasinage que nous avons effectué, mais j’ai été impressionné par la
variété et la qualité de tout l’attirail disponible (linges, serviettes,
brosses, gants de crin, bouquets de rameaux de bouleau [vihta], huiles essentielles, savons, seaux, louches, etc.) pour
agrémenter le plaisir du spa finlandais. Il y a de quoi faire peau neuve à
chaque fois.
Il faut faire vite, car nous
n’avons pas beaucoup de temps pour découvrir la ville et pour pouvoir profiter
encore des quelques heures de clarté avant qu’il ne fasse nuit. Je n’ai pas utilisé
d’ensoleillement, car, je l’ai dit, le temps était gris avec une très légère
bruine, mais ce gris devient pénombre et noirceur dès le milieu de
l’après-midi. Il est vrai qu’à ces latitudes (voir la photo ci-contre pour
découvrir à quelle latitude et longitude nous nous trouvions) et à cette époque de l’année, le
soleil peine à se hisser au-dessus de nos têtes, mais projette ses rayons obliques qui étirent les ombres sur des longueurs de plus en plus longues. Aussitôt
sortis, nous nous retrouvons dans une première galerie d’art contemporain, à
quelques encablures de l’hôtel (on n’est pas dans une ville portuaire pour
rien). L’Autre me disait que lors de son premier voyage (en 2008), cette
galerie était immense et présentait un large éventail de ce qui se faisait de
mieux en art actuel dans le pays. Aujourd’hui, cette galerie (très petite)
présentait des œuvres en porcelaine (dont certaines passablement jolies) et une
projection vidéo (discutable). Cependant, l’autre lieu adjacent, immense, était
lui complètement vide. « C’est là !
C’était là !, que L’Autre me dit, qu’il y avait tant de belles choses ». Encore une fois, Bravo
Monsieur le guide ! Nous continuons notre itinéraire dans la ville, comme un
retour sur les lieux d'un crime, celui de L’Autre. Le même comptoir lunch, le
même café, les mêmes magasins et boutiques. Cela ne me gênait pas, car tout
était nouveau pour moi. Étions-nous à la recherche d’un fantôme ? Étions-nous
en pèlerinage ? Ce n’est pas à moi qu’il faut poser la question, mais à
chercher trop fort, on peut arriver à réincarner des souvenirs. Vous ne perdez
rien pour attendre, poursuivez votre lecture…
En route vers la Corderie.
Des girafes d'acier nous indiquaient la direction à suivre.
Autoportrait mouillé.
Magnifique et immense sculpture en plein tissu urbain. (dommage, aucune plaque pour nous mentionner son titre et le nom du sculpteur)
Je rêve de voir un jour la sculpture "L'Homme", d'Alexander Calder, revenir en plein centre-ville de Montréal et non pas être en pénitence dans le purgatoire insulaire, qu'est le Parc-Jean-Drapeau.
L'ancienne Corderie.
Au fond, le Sénat, vue de la place éponyme.
La Cathédrale luthérienne d'Helsinki.
Petite église derrière la Cathédrale.
Autre port, autre navire.
La Cathédrale orthodoxe Ouspenski.
Arrangement automnal qui n'avait pas besoin d'être arrosé.
Une architecture différente et massive...
...avec une décoration inspirée de la mythologie nationale où Kalevala (la terre finnoise) doit se battre contre Pohjola (le pays du nord)...
... on le rappelle à quelques endroits dans la ville...
... en passant, les reconnaissez-vous ? C'est L'Autre et moi en visite à Helsinki. À vous de choisir qui est qui.
Quelle prestance et quel accueil ! Sculptures sur la façade de la gare centrale (1914) d'Helsinki. Immeuble de style Art nouveau tardif, de l'architecte Eliel Saarinen. J'ai le goût d'aller prendre le train !
Le gros "rush" des emplettes des Fêtes !?! Non, plutôt la ville fantôme d'Helsinki by night.
Décoration de Noël.
Une porte avec un petit look Europe de l'Est.
Bel immeuble Art nouveau.
Hôtel de ville d'Helsinki.
Bon ! ce premier tour d’horizon
d’Helsinki donne faim. Il y a déjà eu ma première tartine de crevettes et de
saumon fumé et pour L’Autre, son sandwich au bœuf, pour nous aider à passer la
journée, mais ils n’auront été que de petits en-cas avant notre premier vrai
repas finlandais. Et qui parle de cuisine originale en Finlande, fait référence
à la cuisine rustique de la Laponie. De plus, quel meilleur moment (juste deux
semaine avant Noël) pour déguster du renne… Désolé Père Noël ! L’Autre
m’avait appelé, quelques semaines avant notre départ, pour savoir quel soir je
voulais aller manger au restaurant LAPPI, LE restaurant de spécialités
Laponnes d’Helsinki. Dans le fond, je pense qu’il voulait juste vérifier si
j’avais déjà acheté des billets de spectacles (un opéra, un concert, etc.),
comme il m’arrive parfois de le faire. Mais loin de moi, cette fois-ci,
d’acheter des billets d’opéra et d’oublier l’heure de la représentation, une
fois rendu sur place, comme cela nous est arrivé à Stockholm,
l’année dernière. Mais avec notre après-midi passé à marcher sur les traces
d’un souvenir, je pense qu’il ne voulait pas rater, cette fois-ci, d’aller
manger à ce restaurant, qui ne se désemplit pas, soir après soir, de touristes
comme de clients locaux (en passant, mon voisin de siège dans l’avion était
assis à deux tables de la nôtre… Ah que le monde est petit !). Pour vous mettre
dans l’atmosphère, voici un aperçu des plats que nous avons mangés dans cette cabane à sucre finnoise (allez voir les
photos sur le site du restaurant) :
Typique des en-cas des pays du nord de l'Europe.
Moins typique, mais tout aussi bon.
Le menu du restaurant, en français.
Voici le plateau d'entrées variées : En haut de gauche à droite : Compote d'oignons confits, carpaccio de renne fumé, fromage fermier (avec sa compote de mûres jaunes), mousse de saumon et filets d'ablette (genre d'hareng) fumé. En bas, de gauche à droite : Salade de champignons des bois, viande de renne séchée, foie de renne avec une sauce de canneberge (airelle), caviar d'un poisson ?? sur une crème caillée, genre yogourt.
La soupe Maison, au fond à droite, était très délicieuse.
Pour L'Autre : Sauté de renne sur purée de pommes de terre avec airelles.
Pour moi : Jarret de renne braisé.
Une fois repus et somme toute
passablement ravis par notre repas de venaisons finnoises, nous sommes
retournés directement à l’hôtel où la chaleur de notre sauna privé était la
bienvenue. Mais dans mon cas, l’appel de Morphée a été le plus fort et c’est à
peine trente secondes que j’ai passées dans le sauna. Au demeurant, L’Autre
aura eu plus d’espace pour ses ablutions.
Bonne Fête nationale ! Car en
effet nous étions le samedi 6 décembre, jour de l’indépendance du pays (depuis 1917).
Qui dit fête nationale, dit jour férié, dit tout est fermé… et en Finlande,
c’est vrai pour tout ! L’Autre va-t-il survivre à ce désert
mercantile ? Et moi, à cette sécheresse culturelle ? La seule piste viable et
possible pour nous de faire, durant cette journée de disette, était d’aller
visiter l’équivalent d’un salon des métiers d’art qui était ouvert seulement
deux jours (la veille et la journée du 6 décembre). Ouf, nous étions sauvés,
car au moins une oasis s’offrait à nous dans toute cette grisaille. Nous étions
justement en train d’en discuter tout en prenant notre petit déjeuner au
restaurant de l’hôtel, que tout estomaqué, je mentionne à L’Autre : « Je crois avoir une hallucination ».
En effet, je pensais avoir vu Aristée,
le dieu champêtre (fils d’Apollon et de la nymphe Cyrène), et par extension, le
dieu des jardiniers. L’Autre, intrigué, se casse le cou
pour voir l’apparition. Une fois celle-ci localisée, une fois l’œil focalisé,
sa respiration se fait plus courte, une étincelle se loge au coin de son œil. À
peine ébaubi, il se tourne vers moi et me confirme que je n’hallucine pas et
non, ce n’est pas Aristée, mais bien son ami commissaire, un habitué d’Helsinki,
son compagnon lors de son premier séjour en Finlande. Suis-je surpris ? Pas le moins
du monde. C’est devenu tellement banal pour nous, lors de nos voyages, de
rencontrer à l’improviste des gens que nous connaissons, que nous commençons à
croire que la Terre n’est rendue qu’un grand jardin, rempli de « Jardinières » !?! (Excusez le ton grandiloquent de cette
dernière phrase, mais elle contient un sous-message pour les initiés… désolé
pour les autres.) Bon ! nous faisons un peu de place à notre table et
invitons L’Ami à se joindre à nous pour le petit-déjeuner. C’est là que
nous apprenons qu’il est dans la ville depuis maintenant une semaine et qu’il
repart pour Montréal le lendemain matin, aux aurores. (Cela veut-il dire vers 9h30 du matin, car le soleil se lève tard par
les temps qui courent, ou bien au milieu de la nuit vers 6h30 ? Je n’ai pas
demandé d’être éclairé sur l’heure du départ.) Nous avons profité de sa
présence et de sa connaissance de la ville pour lui demander quelques conseils
pour garnir notre carnet de visites de la ville. Il nous a confirmé que tout
était fermé aujourd’hui, journée de la fête nationale. Il a ajouté que les
dimanches la plupart des commerces étaient également fermés. En plus, et pas de
chance pour nous, les trois principaux musées de la ville étaient fermés pour
fins de rénovations (pour 3, 6 et 9 mois). Il nous restait donc plus que les
promenades dans la ville et dans le groupe d’îles de Suomenlinna, à l’entrée
de la rade d’Helsinki, et où se trouve l’une des plus vastes forteresses
maritimes du monde, classée au patrimoine mondial de l’UNESCO. Et encore pas de
veine pour nous, car tous les sites et musées de l’île (6 au total) étaient
fermés pour la saison hivernale, sauf un, le musée Suomenlinna qui raconte
l’histoire de la forteresse et du site en général. L’Ami nous a quand même
encouragés de s’y rendre, car le site en vaut vraiment la peine.
C’est un bon début, mais nous
étions venus à Helsinki pour voir les marchés de Noël, mais il n’y en avait pas
un d’ouvert. Nous avions bien vu la veille, qu’un important marché était en
plein préparatif sur la place du Sénat, juste en face de la principale église
de la ville, la cathédrale d’Helsinki, mais pas d’indication sur la date de son
ouverture. L’Ami n’a pas été en mesure de nous donner l’heure juste sur le
marché de Noël, ni sur le salon des métiers d’art qui avait lieu à l’ancienne
corderie d’Helsinki. Au moins, il a pu nous indiquer que la fameuse
galerie-boutique, que L’Autre m’avait amené voir la
veille, était fermée depuis maintenant quelques année et que l’ensemble des
artisans, artistes et designers, que l’on y retrouvait, ont maintenant ouvert
boutiques dans le quartier limitrophe que l’on désigne comme le Design District Helsinki. À défaut d’avoir des boutiques et galeries ouvertes,
nous ferons au moins du lèche-vitrine culturel.
Pensez-vous que nous y avons trouvé des marins ou des petits matelots ? Ei mitään! Nada! Niente! Nothing! Rien !
Ce qui est IN en décoration intérieure actuellement ! Non merci, pas pour moi.
Vitrine intrigante ! On se rapproche...
... Qui vois-je ? Le Chaperon rouge... La chanceuse, elle va rencontrer le loup...
... pendant ce temps, son frère virevolte au-dessus du bonhomme de neige. Ah ! ces garçons, ils ne sont jamais fiables.
J'ai le goût de m'enfuir ! Si j'étais à leur place (à droite), je m'envolerais.
Pour un instant, je me suis cru à Venise.
Décoration florale aux couleurs nationales.
Intéressant !
C’est armé de toutes ces
informations que nous avons attaqué la visite d’Helsinki, toute grise sous la
bruine et toute fermée sur elle-même. En nous rendant à la Corderie, nous avons
fait un détour par le quartier du design pour avoir un avant-goût de ce qui
nous attendrait dans les prochains jours. Premier arrêt, première vitrine,
celle de la boutique Artek, dépositaire de la collection
des œuvres d’Alvar Aalto (célèbre
designer finlandais, surtout connu pour ses vases tout en courbes et son
mobilier aussi élégamment galbé) et autres articles emblématiques du design
finnois, tant moderne, classique, que contemporain. Pour vraiment apprécier, il
faut aimer beaucoup le bois, le design des années 30 aux années 70. Je
reconnais la qualité du travail, mais je suis davantage attiré par le style
rustico-baroque (pensez à mon plaisir ressenti en Sicilecet été), que par ces années, tellement « Trendy »
par les temps qui courent, surtout pour certains commissaires ! Je ne me laisse
pas transporter par les tendances ou les modes, j’apprécie ce qui est beau,
quel que soit son époque. Quand nous y sommes revenus, nous avons vu un mobile
composé d’ailes, qui une fois alignées formait une grande aile très belle
(désolé, pas de photos). Un coup de cœur beaucoup trop cher pour notre bourse,
même celle de L’Autre. Continuons notre chemin vers la Corderie… nous passons
par le square triangulaire Kolmikulma (cherchez l’erreur Docteur!) et par la
rue Uudenmaankatu (j’écris le nom des
lieux et rues, juste pour vous donner un aperçu de la langue locale – j’y reviendrai plus loin), le cœur du Design District, pour faire une première
reconnaissance des galeries et boutiques. Mais les rues sont vides de vie. Nous
sommes les seuls à marcher dans le quartier. Deux kilomètres plus loin et après
quelques détours dans des rues transversales et sur le port, nous voyons enfin
des gens, car nous arrivions devant un restaurant Mc Donald ouvert et remplis
d’enfants avec leurs parents, juste à côté d’une station de métro. Nous avons
marché encore à peu près 250 mètres (dans la même direction que d’autres promeneurs)
pour finalement arriver à la Corderie. Et là, une fois entré, c’était la
folie, c’était plein de monde. C’était comme si tous ces gens étaient arrivées
par les entrailles de la terre. L’Autre et moi avons fait un tour curieux
et attentif de tous les stands du salon des métiers d’art. Il fallait en
profiter, car c’était notre seule chance de la journée (voire de la fin de
semaine, car la plupart des boutiques et magasins sont fermés le dimanche) pour
faire aller notre carte de crédit. Tant d’efforts pour seulement quelques
chandelles achetées.
Vitrine de chez Artek.
Chez Artek : Moule creusé à même un tronc d'arbre pour la fabrication des vases d'Aalto.
Autoportrait double inspiré par notre dernière visite à Philadelphie.
De retour au centre de la
ville, nous sommes repartis pour retourner vers la Cathédrale pour voir si le
marché de Noël était ouvert. Pas de chance. Nous avons poursuivi notre visite
de la ville même si la pluie était un peu plus dense. Juste comme nous étions
sur le point de rentrer à l’hôtel, nous voyons qu’il se passe quelque chose, la
police commence à couper toute circulation sur la rue principale, juste en face
de notre hôtel. En regardant plus loin je m’aperçois qu’un défilé aux flambeaux
(des torches dans les faits) s’en vient vers nous. J’avais vu dans la
documentation sur la ville, qu’un tel défilé avait lieu le jour de
l’Indépendance. Pour une fois, notre timing
était bon. Nous avons donc décidé de regarder passer la parade et de suivre le
défilé jusqu’à revenir sur la place du Sénat, où tous les participants se
retrouvaient pour entendre des discours patriotiques et de circonstance. Même
si nous n’avons rien compris, c’était quand même très typique. Une fois les
discours terminés, nous sommes revenus finalement à notre hôtel afin de se
préparer pour souper. Tout en se préparant, nous avons écouté et surtout
regardé, à la télé, le défilé sur le Tapis Rouge de la longue, la très longue
liste d’invités à la réception donnée par le Président du pays, pour commémorer
la Fête nationale. Si L’Autre a bien compris, il y avait
près de 1 800 invités. Cela en fait des mains à serrer. Je vous le dit, nous en
avons vu des médailles (de toutes les formes sur des torses et bustes chargés
de rubans bariolés), des robes, des smokings et des cravates, couleur bleue
foncée (la même que celle de la croix du drapeau national) et des costumes
traditionnels (de la même palette de couleurs que celle du costume du Père
Noël). Nous étions tellement captivés par ces images, que nous sommes
presque arrivés en retard pour notre réservation au restaurant.
Le défilé arrive juste devant notre hôtel.
Le bel immeuble juste en face estune partie du grand magasin Stockmann.
Sur la Place du Sénat, juste devant la Cathédrale luthérienne d'Helsinki.
Vue rapprochée.
Le Savoy, l'un des plus chics restaurants d’Helsinki. La décoration du
restaurant, ouvert en 1937, est en partie l’œuvre d’Alvar Aalto, et tout (ou presque) est demeuré intact, jusqu’à
aujourd’hui. Cela lui donne un air suranné qui n’entache en rien la qualité du
service et de sa gastronomie. Encore une fois, L’Autre avait fait une
réservation longuement à l’avance pour être certain que nous aurions une table.
Deux, trois semaines avant notre départ, il m’appelle pour me dire que le
restaurant l’on contacté pour lui faire savoir que le soir du 6 décembre
(journée de la Fête nationale) la carte régulière du restaurant ne serait pas
disponible ce soir-là, car le restaurant servira un menu gastronomique
spécialement pour l’occasion, et ils voulaient vérifier que cela faisait
toujours notre affaire. « Oh ! que
oui », avait répondu L’Autre. Histoire de vous faire
saliver et vous rendre jaloux de ce que nous avons mangé, je vous retranscris
le menu que nous avons savouré :
SAVULOHITERRIINIÄ,
MUIKUNMÄTIÄ
JA FENKOLIHILLOKETTA
KUHAA
MANNERHEIMIN TAPAAN 2014
SALLALAISTA
VILLIPOROA KAHDELLA TAVALLA,SELLERPYREETÄ JA TUMMAA TYRNIKASTIKETTA
KOTIMAISIA
JUUSTOJA
LUUMUBAVAROISE, TOSCAKAKKUA
JA KIRSIKKASORBETTIA
N’est-ce pas que c’est
alléchant et prometteur ! Le tout débutant par un verre de Champagne, comme
apéro, poursuivi par un assortiment de vins et alcools choisis pour
accompagner merveilleusement chacun des plats. Une image vaut mille mots et
celles-ci vous aideront à mieux décrypter le menu.
Une vue partielle de la salle à manger.
Première entrée : Terrine de saumon fumé avec caviar de corégone blanc avec sa compote de fenouil.
Seconde entrée : Sandre (perche) à la Mannerheim 2014.
Plat principal : Renne sauvage de Salla selon deux façons avec sa purée de céleri et sa sauce d'argousier sombre. (le renne, rien à voir avec celui de chez Lappi)
Désolé ! aucune image pour les deux plats qui ont suivi : Fromages
finnois Bavaroise
à la prune, gâteau Tosca avec sorbet à la cerise (Je pense que les vins avaient déjà commencé à faire leur effet)
Cela a été fantastique. Au
demeurant, la seule chose que vous voudrez connaître de notre part, après un
tel festin, c’est la jouissance gustative ressentie par nous, tout au long du
repas. Les bons alcools, en qualité et en grande quantité, auront eu raison de
moi, et je n’ai pas été en mesure d’utiliser le sauna une fois de retour dans
notre chambre. Le prix ! on n'en parle même pas, il y a Master Card, Visa, American
Express ou toutes celles-ci à la fois. Dernière petite anecdote sur notre
soirée au Savoy. On nous avait dit que le restaurant était complet pour la
soirée, mais trois tables demeuraient vides (en outre une de huit places), même jusqu’à 22 H. L’Autre et moi nous nous disions que les temps étaient
difficiles et que les gens avaient annulé à la dernière minute leur
réservation. Nous étions très loin de la vérité et c’est quelques minutes plus
tard que nous avons vu arriver les retardataires tout endimanchés de robes, de
vestes, de complets, de cravates bleues ou d’autres riches couleurs, tous
couverts de médailles ou de bijoux chatoyants. À cet instant, le restaurant se
voulait le prolongement du tapis rouge vu plutôt en début de soirée. L’Autre
et moi nous nous sommes dit que la bouffe du Président ne devait pas être aussi
bonne ou du moins pas assez bourrative pour leur permettre de passer rassasiés à
travers les festivités de leur fête nationale. À défaut de médailles ou d’avoir
porté ma chemise à boutons de manchette (du même bleu que celui de la croix du drapeau
finlandais) pour les accompagner, j’aurais aimé pouvoir leur montrer au moins
mon scapulaire, si j’en avais eu un (autres temps, autres mœurs).
Ciel ! que je suis prolixe. Il
y a plusieurs années, une Française a dit, en parlant de moi, que j’étais une
vraie diarrhée de mots. C’est drôle, je ne m’étais pas reconnu. Et dire que je
suis à peine rendu qu’à la moitié de notre escapade à Helsinki. N’ayez crainte,
je vais en venir à bout… et plus vite que vous ne le pensez !
En parlant d’autres temps,
d’autres mœurs, au rez-de-chaussée du même immeuble où se trouve le restaurant Savoy (au dernier étage, avec une
terrasse offrant une belle vue sur la ville), il y a le magasin de tissus et de
linges de maison Finlayson, la deuxième enseigne la
plus connues de Finlande après celle de Marimekko(qui fait aussi un peu
dans la vaisselle). Ces deux grandes maisons offrent un large éventail de
tissus et articles confectionnés aux couleurs très gaies, d’un design le plus
souvent très « Sixties », mais pas uniquement. Je vous l’ai dit, cette
époque n’est pas ma préférée, mais je vois que les deux maisons font des
efforts pour actualiser leurs styles. À cet égard, je préfère les tissus
suédois que l’on retrouve, entre autres, à la boutique Svenskt Tenn, à Stockholm.
Néanmoins, et comme c’est souvent la norme en Finlande et dans les pays
scandinaves, l’accent est toujours mis sur le (la) designer, l’artiste, même si
parfois la qualité de la création peut être discutable, voire choquante face à
la pudibonderie de certaines personnes. Cela peut créer des surprises… et de
taille !!
Vitrine de chez Marimekko avec un exemple des tissus de la nouvelle collection (design de Joulun Ainekset).
Cette nouvelle collection est très riche par son motif et ses couleurs (on sent une touche plus chaude, plus ensoleillée, moins 60's, - Une petite influence vénitienne peut-être ?), mais je me pose la question sur son utilisation. Ici, l'on voit des coussins, mais la répétition du motif (trop circonscrit et identifiable) ne donne pas toujours des résultats heureux (si l'on se réfère aux vêtements, aux recouvrements de meuble, comme nous avons pu le voir dans la boutique).
On a le pied doublement marin (et sur la "pitoune" à part ça) C'est Touko Laaksonen (1920-1991), dessinateur homosexuel de la série Tom of Finland, qui serait surpris et content.
Quelles turgescences ostentatoires, dans ces frocs aux limites de l'élasticité. La maison Finlayson a osé, mais a quand même retenu que les modèles les plus pudiques, car l'iconographie fantasmée et fétichiste d'hommes, composant l'univers de Laaksonen, va beaucoup plus loin et est sans limites.
Pour aller prendre un sauna.
Faites de beaux rêves !
Le dimanche, nous sommes allés à
Suomenlinna, pour visiter la
forteresse et se promener sur les îles. L’Autre avait tellement peur de
rater le traversier de retour, que nous n’avons même pas pris le temps de
visiter le seul musée ouvert sur le site. Néanmoins, la promenade a été très
agréable. Voyez !
En route vers les îles de Suomenlinna.
Juste à droite, en sortant du traversier.
Dans les entrailles de la forteresse.
Détail du monument aux morts au centre de la place de la grande cour Linnanpiha.
Un David "Elvis" finnois.
Une végétation en sursis, face à l'hiver qui se fait attendre.
Mon premier carré finnois : celui-ci est végétal.
L'oiseau botté finnois.
"Épée de Gustave", la ligne de défense maritime construite par les Russes à la fin du XIXe s.
L'oranger de la rouille du passage du temps.
Vue de la cour intérieure de la forteresse.
La vie...
... s'accroche sur tout.
Garage à bateaux ou cimentière ?
Un peu de peinture et cela vous "repèpe" la coque et le look.
Ces épaves sont dues pour le cimetière.
À défaut d'en avoir souvent, on peinture les coques de tons chauds, couleurs de soleil.
Mon carré "Jean-Paul Riopelle".
Déconfiture !
Mon carré "Bleu, Blanc, Rouge".
Il y a la baleine à bosses et la coque à bosses.
Quand le bateau devient chair.
Mon carré "Bleu finnois".
Survie !
Dans le chantier naval (pour la réparation des bateaux) nous avons du bois, des troncs d'arbre gigantesques pour de hauts mats, des planches assez larges pour en faire une table de chacune.
Sans titre.
Ma cabane en pays finnois.
Je m'ennuie de mon étang.
Ma fenêtre jaune safran.
Le seul rayon de soleil de notre séjour à Helsinki.
Bouteille à la mer échouée ?
Portes d'un blanc laiteux.
Il va falloir bientôt larguer les amarres.
Centre des visiteurs à l'entrée de l'île.
La tour a un petit air d'Italie, peut-être à cause de sa couleur.
Juste avant notre retour sur la terre ferme.
La Grande Bellezza en Finnois, Çà vous tente ?
Comme nous sommes revenus finalement
assez tôt des îles, nous sommes retournés voir si le marché de Noël était finalement
ouvert. Et encore non, mais cette fois-ci nous avons vu que les marchands
commençaient à remplir leurs étalages. Il était donc clair que le marché
ouvrirait le lendemain. Ouf ! nous ne serons pas venus pour rien. Un petit arrêt
pour prendre un café et chocolat chaud au Café Engel et nous poursuivons notre
visite en entrant dans le cinéma Kino Engel, qui propose une petite exposition temporaire,
le temps que la restauration du musée municipal (situé juste en face) soit
complétée. Mais, juste comme nous étions sur le point de ressortir de l’immeuble,
L’Autre
m’entraine dans le sous-sol de l’immeuble, où se trouvent les salles de
cinéma (un cinéma répertoire), il entre dans une salle minuscule, je le suis ;
il s’assied, je fais de même ; débute un documentaire historique sur la Finlande,
en finnois, et nous le regardons jusqu’à la fin. Trente-quarante minutes plus
tard, nous nous levons, sortons du cinéma et ce n’est qu’alors que je lui
demande : « Comment est ton
finnois ? J’espère que tu as bien saisi les nuances dans l’explication du
rapport de la Finlande avec l’Allemagne nazi, dans la partie du film où l’on voit
le Président finnois parler avec Hitler ? » Pour toute réponse, je n’ai eu
aucune !?! Dans le fond, je pense que L’Autre voulait calmer sa poussée « hernienne », sans avoir à
avouer qu’il avait besoin d’une once de repos ou peut-être qu’il était, lui
aussi, en train de finir d’éliminer les reflux gastriques, résultantes de notre
bombance de la veille. Mais cette petite pause cinématographique m’a fait
réaliser que si le finnois semble une langue rébarbative à première vue (un Antonio
Salieri de la langue dirait qu’il y a trop de voyelles et de dédoublement de
consonnes), mais à l’écoute, sa sonorité a des tonalités semblables à celles du
français, un peu comme avec le hongrois. Ça sert à quelque chose de voyager. On
se surprend à être interpelé par une conversation autour de soi, croyant
entendre quelqu’un parler en français, je dirais même parfois avec un accent
québécois. Après vérification, j’ai appris que le finnois fait partie du groupe
linguistique finno-ougrien, également représenté en Europe par le hongrois et l’estonien.
Mon oreille avait donc tout à fait raison d’être volage. Ce n’est pas tout,
elle sille également, car j’allais oublier de vous mentionner que pour un pays avec
une si petite population, un peu moins de 5,5 millions d’habitants (soit les
2/3 de la population du Québec ou aussi peu que 8 % de la population de la France)
et qui parle une langue unique (le finnois), j’ai rarement vu un peuple aussi ouvert
à l’autre et qui fait tout pour faciliter la communication entre les peuples. Un
exemple, dans tous les endroits et attraits touristiques où nous sommes allés,
il n’est pas rare de trouver la documentation disponible dans au moins dix
langues différentes. C’est un exemple digne de mention.
Au musée municipal temporaire.
Photo ancienne du port d'Helsinki. On voit à gauche (juste après les embarcations) le Vieux Marché couvert (récemment rouvert). Superbe rénovation et un aménagement d'une intelligence rare (compte tenu de la petitesse des lieux). Bravo ! Bravo ! et encore Bravo !...
... en passant, je me suis fait même des amis.
Je reviens au musée... On dirait que les médailles sont de retour. Mais il y en a partout ici à Helsinki !
Avec Google Traduction, je sur sûr que vous arriverez à comprendre l'histoire.
C'est assez pour aujourd'hui, moi, j'rentre à l'hôtel. Ciel ! c'est vrai, nous n'avons pas encore soupé.
Pour notre troisième soir à
Helsinki, nous sommes allés manger au café-restaurant Kappeli, au cœur
de l’espace vert (sic ! à cause de la saison) de l’Esplanade, les Champs-Élysées
d’Helsinki. Ce restaurant est situé dans un immeuble de style Art nouveau qui donne
un peu l’impression d’aller manger au restaurant Le Pavillon Élysée Le Nôtre à
Paris ou dans la serre du Cristal Palace de Madrid. Nous avons
bien aimé, mais ce n’a pas été notre repas préféré. Cependant, en plein été, l’expérience
doit être toute différente.Voici un bref aperçu de ce nous avons mangé :
L'entrée pour moi : La casserole de légumes Kappeli, avec pistou et pecorino.
L'entrée pour L'Autre : Aubergine grillée, betterave, fromage de chèvre avec purée de chou-fleur et champignons.
Le dessert : Tarte aux bleuets, avec glace au bleuet (tellement finnois).
Finalement, le lundi, dernière
journée complète dans la ville et la seule journée où tout était ouvert. Pas
besoin de nous demander ce que nous avons fait. Nous avons magasiné toute la
journée. Nous n’avions pas assez de mains, tous les deux, pour transporter tous
les achats de L’Autre. Pour ma part, j’ai été très modeste et je me suis
forcé à rapporter un souvenir utilitaire, marqué du design finlandais… un
sécateur (j’avais échappé le lien dans le fleuve en octobre dernier). Je pense
que vous devriez connaître le nom de l’entreprise finnoise qui les fabrique,
je vous donne un indice, ils adorent la couleur orange... cela vous met-il sur
la piste ? Un petit effort, je suis convaincu que vous connaissez... vous avez
fort probablement un de leurs produits à la maison !...
Source : FISKARS.com
Notre dernier repas à Helsinki
a été un peu du Comfort Food pour
nous, du moins pour moi. Une pizza. Nous n’étions pas en Italie, mais cela a
fait l’affaire. Le lendemain matin nous quittions Helsinki assez tôt pour un
premier vol vers Paris et un second vers Montréal. Dans l’attente entre les
deux vols, j’ai bouquiné à Paris, et je me suis offert comme cadeau de saison trois
livres : un américain (R. J. Ellory), pour mon retour en Amérique ; un
suédois (Lars Kepler), pour rester encore un peu dans l’atmosphère scandinave ;
et un italien (Donato Carrisi), pour mon amour inconditionnel du vibrato que
ce pays me fait vivre, mon Arcadie. Je me suis mis à la lecture de mon troisième achat
immédiatement arrivé chez moi. La femme aux fleurs de papier, de
Carrisi, je suis encore sous le charme de ce récit, aux élans poétiques. On est
loin ici de ses thrillers précédents (Le Chuchoteur, Le Tribunal des âmes, l’Écorchée).
Une agréable surprise et l’une de mes belles lectures de l’année. En prime, je vous laisse cette citation, tirée
du livre : « … que pour rendre un homme heureux il suffit de lui offrir la
possibilité de raconter ».
Bon, je vous laisse finalement,
vous pouvez retourner à vos vies.