jeudi 3 décembre 2015

Les Pouilles (2) – 22 au 31 Juillet 2015



Accompagnement musical

Rien de mieux que l’opéra italien pour accompagner vos balades dans la campagne des Pouilles car le décor est tellement baroque et lyrique. Qui pense opéra et Mezzogiorno ne peut pas ne pas évoquer l’âge d’or des castrats – une coutume ou, devrais-je plutôt dire, une pratique « mezzogiornienne » d'émasculation qui a eu cours durant une longue période (de la 2e moitié du XVIe s. à la fin du XIXe / début XXe s.) – pensons par exemple à Carlo Broschi dit « Farinelli » (1705 – † 1782), chanteur pour Porpora, Vinci et Hasse (jamais pour Haendel, même si le film au titre éponyme de Gérard Corbiau [1994] le laisse croire, cette rencontre n’est que pure fiction), à Gaetano Majorano dit « Caffarelli » (1710 – † 1783), chanteur pour Porpora, Hasse, Pergolesi et Haendel (cette fois-ci, c'est vrai), ou, pour les amateurs de littérature, à Antonio Uberti dit « Porporino » (1697 – † 1783), principal protagoniste du roman de Dominique Fernandez : Porporino ou les Mystères de Naples (Grasset, 1974). Cette époque est bien révolue, mais les magnifiques airs et opéras ont survécus jusqu’à nos jours. Aujourd’hui, ce sont les contre-ténors qui ont le vent en poupe pour reprendre à merveille ce répertoire. Vous le savez maintenant, j’aime bien Philippe Jaroussky (voir mes propositions musicales précédentes : Naples Jour 1, Naples Jour 2 et Splendore a Venezia), mais il n’est pas le seul à occuper le terrain. Il y a quelques semaines j’ai découvert le magnifique enregistrement de Catone in Utica de Leonardo Vinci (Strongoli en Calabre 1690 – † Naples 1730) sur étiquette DECCA. Faute de n’avoir pu trouver sur YouTube l’ensemble de l’œuvre, je vous propose malgré tout trois courts extraits interprétés par des contre-ténors provenant d’horizons divers, mais non italiens :

Leonardo Vinci : Catone in Utica
Interprètes : Max Emanuel Cenčić (Croate),
Franco Fagioli (Argentin) et Valer Barna-Sabadus (Roumain)



Les Pouilles  Excursion 2

C'est toujours basés à Tarente que nous avons poursuivi nos pérégrinations. Après une première excursion à Alberobello et surtout à Martina Franca (Les Pouilles 1), la barre était haute pour satisfaire notre curiosité et nos attentes. C’est en empruntant l’emprise de la Via Appia (voie Appienne), ancienne « autoroute » romaine reliant Rome à la Grèce, que nous nous sommes rendus jusqu’à Brindisi, terminus de cette route et trait d’union entre l’Occident et l’Orient. La tentation était grande de prendre le traversier pour nous rendre à Corfou en Grèce, mais nous avons su résister aux appels de la mer et à la douceur de cette île enchanteresse (microcosme d’Italie et de Grèce auréolé de l’influence vénitienne), seulement quelques vagues réminiscences d’un agréable séjour ancien sont remontées à la surface.

Point de farniente pour nous sur la côte, après une courte visite de Brindisi, nous avons plutôt repris le chemin des terres pour revenir vers Tarente en passant par Ostuni et Grottaglie. Petites routes, petits villages et petites villes étaient au menu pour nous faire voir la douceur de la campagne généreuse, pour nous faire goûter aux saveurs locales et pour nous faire découvrir l’effervescence de l’artisanat et de l’art régional.

Brindisi

Ville de passage, lorsque que vous êtes en partance pour la Grèce, l’Albanie, ou l’ailleurs, Brindisi ne semble pas a priori attrayante. C’est souvent la fausse impression, le préjugé, qu’on a avant d’y être venu. L’image glauque ou coupe-gorge qu’on a tendance à attribuer à ces vieux ports de transit est tellement loin de la réalité, car Brindisi est devenue une ville pleine de vitalité qui a su rénover ses monuments et musées et moderniser son centre-ville (en parti piétonnier) et son bord de mer (avec quelques cafés, bars et terrasses). Arrivés tôt le matin, L’Autre et moi y avons passé quelques heures à nous promener sans attentes particulières, au gré de notre curiosité (et ce sans guide ou programme de visites). Nos pas nous ont entre autres amené à visiter la collection archéologique S. Faldetta (et non pas le musée archéologique régional), à prendre une pause sucrée au bar à chocolat de la Pasticceria Bernardi, à faire un voyage dans le temps à l’époque des Templiers en allant visiter le Tempio S. Giovanni al Sepolcro, petit édifice circulaire (comme le Saint-Sépulcre) d’architecture normande (XIe s.). Ce fut bref, mais ce fut bien et bon.

Copie de la colonne marquant la fin de la Via Appia.


En face, c'est le port interne où seuls les bateaux de plaisance s'y amarrent maintenant.


Ici aussi, l'influence de Venise s'est fait sentir.
Un peu de crépit et de peinture feraient du bien.


Ici, un coup de brosse à récurer le rendrait moins triste.


Cratère attique à figures rouges et autres vases antiques
de la Collection S. Faldetta.


Venise en a inspiré beaucoup...
... à vous de juger du talent.



En se promenant dans le quartier du duomo.


Détail du Monument aux fils de Brindisi morts pour la patrie lors de la 1re Guerre mondiale.


Moi je vous le dit : "La guerre c'est pas jojo." 

Linteau en marbre du portail de l'entrée du Tempio S. Giovanni al Sepolcro.



Fresques et détails architecturaux du temple circulaire.


Est-ce que ce Vendetta (avec le chiffre 1) est le premier indice ou
le point de départ d'une chasse au trésor ?


Façade du palais nobiliaire (1565) de la famille Granafei Nervagna.


En prime, quelques beaux heurtoirs.



Ostuni

Avant d'arriver à Ostuni, cette « acropole » blanche perchée au sommet d'un îlot entouré d'une mer d’oliviers à la frondaison d’un camaïeu passant du vert foncé au vert clair argenté, nous avons fait un arrêt à San Vito dei Normanni, bourgade agricole typique du Salento. Nous ne devions qu'y faire un arrêt technique pour nous ravitailler en eau, mais heureux hasard, nous sommes arrivés juste à temps pour voir à la sortie de l’église un autre mariage (décidément, c’était la saison)… un peu plus et nous étions pour être invités à la noce. À la place, nous avons pris quelques minutes pour nous promener dans les rues paisibles et quasi désertes, nous étions en plein pisolino (l’heure de la sieste).

Revenons à Ostuni. De son passé byzantin puis angevin et aragonais la cité, aux allures orientales, a conservé plusieurs fragments (tours et fortins) de ses murailles qui entourent son bourg médiéval à la manière d’une couronne de blancheur, comme si elle était taillée dans la craie. À s’y promener, on se croirait dans une médina d’Afrique du Nord ou en Grèce, car ici le blanc et le bleu sont omniprésents. Pas besoin de fil d’Ariane pour se retrouver dans le dédale des petites rues, souvent pentues, de cette ville blanche agrémentée de façades d’un gothique tardif en pierre dorée. Même si un tantinet trop touristique, la visite de celle-ci et la tournée des boutiques et galeries nous ont révélé quelques belles surprises. Je me suis même laissé tenter par de la confiture de citrons et par des tranches d’orange confite. Je pensais conserver ces trésors gustatifs pour les partager avec mes amies gastronomes, mais à défaut de leurs visites, je suis à manger les dernières tranches d’orange confite pendant que j’écris les présentes lignes. Elles sont effectivement délicieuses (Oups ! elles étaient, car il n’y en n’a plus) et ont été, par ce jour pluvieux de décembre, un souvenir suave des saveurs salentines. En somme, L’Autre et moi avons bien aimé Ostuni.


San Vito dei Normanni  Intérieur de l'église Santa Maria della Victoria où avait lieu le mariage.


San Vito dei Normanni  L'origine...


... du carré de San Vito  1

La Volks à Vito, la Beetle peau de vache ou dalmatiens en cavale...
À vous de choisir !


San Vito dei Normanni  Monument aux morts de San Vito, l'origine...


... du carré de San Vito  2

San Vito dei Normanni  Poignées de porte pour s'évader, pour s'envoler.


San Vito dei Normanni  Belles persiennes.

San Vito dei Normanni  Des façades...
   
... revampées, patinées...

... ou endormies...

... et où on nous ferme les rideaux au nez pour faire la sieste...


... et moi, j'en profite pour tirer ma révérence sur ce scooter.

En route vers Ostuni, nous traversons une mer d'oliviers sur fond de terre rouge.


Ostuni  La ville blanche assise sur ses murailles.

Ostuni  Rue en escalier typique du bourg médiéval.


Ostuni  La cathédrale Santa Maria Assunta, de style gothique tardif,
est très élégante avec son couronnement d'arcs concaves et convexes.

Cathédrale d'Ostuni  Magnifique rosace à transenne (sans vitraux) à 24 rayons.

Ostuni  Le largo Trinchera, placette qui fait face à la cathédrale est enjambée par une loggia baroque à arcades,
l'Arco Scoppa (1750), qui relie le Palazzo vescovile (l'évêché) au Palazzo del Seminario.

Une galerie d'art donnait sur la placette... 

Ce n'était pas l'heure de l'apéro, mais une discussion bien arrosée et très animée
y avait lieu entre gens de classe...
À savoir si...

… cette patine était bien l’œuvre de CamiloMondo.

Cette dame d'affirmer :
"Je le sais moi. Non ! cette 
œuvre n'est pas un carré de CamiloMondo. Voilà !"...

Ces messieurs de rétorquer en cœur :
"Assurément, elle n'est même pas carrée !?!"
Note : Veillez m'excuser de ne pas vous donner les noms des artistes dont les œuvres ont servi
pour la mise en scène de ma petite plaisanterie, car j'ai oublié de les noter.
Mes excuses s'adressent aussi à eux.
P.-S. : Si je n'avais pas appréciées les œuvres, je ne les aurais pas photographiées.  

Ostuni  Derrière cette porte c'est la Grèce... ou presque.

  
En nous promenant partout dans la vieille ville...


nous avions réellement l'impression d'être ailleurs...


... sur la côte, même si celle-ci est à une dizaine de kilomètres.


Ici et là quelques signes pour nous rappeler que nous étions toujours en Italie.


  
Heurtoirs d'inspiration marine et égyptienne.

Beaucoup de petits passages pour susciter notre curiosité.  


Un bleu "grec" omniprésent.


 Un porte-à-porte fort agréable à faire. 

Une petite note de rose dans tout ce blanc et ce doré de la pierre.


Ostuni est une ville de contraste et de mélange d'époques.

Même les chats par mimétisme se confondent avec le décor.

Il n'y a pas que le bleu...

 
... pour enjoliver les portes.

Heurtoir vert-de-grisé.


Façades des églises de San Francesco (à gauche) et de l'Esprit-Saint (à droite).


Zoom sur les détails d'une porte. 


Traduction : "Buvez du vin à bon escient"
À bon entendeur salut !... ou Santé !

Bruschetti et Aperol Spritz ou panini et Prosecco...
Qui en veut ?

Après un tel festin, nous étions prêts à remonter l'Adriatique en gondole, jusqu'à Venise.

Une dernière porte et...


... un collage Street Art par Hopare pour nous dire au revoir.

Grottaglie


Il était déjà tard en fin d’après-midi quand nous avons quitté Ostuni et il restait sur notre liste la visite de Grottaglie, gros centre viticole, mais surtout connu pour sa fabrication artisanale de céramiques d’usage quotidien. Je n’en titillais pas d’envie car j’avais peur que ces céramiques soient à saveur trop « locale » et de les rapporter chez-nous serait comme revenir du Mexique, en plein hiver, avec un sombrero sur la tête… c’est « cute » (c’est mignon) dans l’avion, mais « quétaine » (ringard) et kitsch une fois rendu dans le stationnement de l’aéroport en train de déneiger sa voiture… encore pire, voir celui-ci suspendu au porte-manteau de l’entrée ou accroché au-dessus du manteau de cheminée dans votre maison. Mais comme nous passions par-là, pourquoi ne pas y faire malgré tout un petit saut. J’avais en partie raison, mais davantage tort d’avoir laissé mes angoisses esthétiques inhiber ma curiosité et méjuger (sans avoir vu) les talents locaux. Je vais mettre ça sur le dos de la fatigue. Il me semble que j’entends L’Autre dire : « La fatigue, la fatigue, mon œil ! C’est plutôt son "écœurite" aiguë de la signalisation routière italienne sibylline et déroutante – Oups ! L’Autre n’utiliserait pas ces deux derniers mots, il dirait plutôt mélangeante, voire contradictoire quand existante – qui lui fit perdre le nord… C’est comme si mon GPS de copilote (CamiloMondo) était non fonctionnel. Ça c’est frustrant en titi. » Bof, laissons-le dire, cela lui fait tellement plaisir. Blague à part, nous avons été surpris et ravie à un point tel que nous avons fait toutes les boutiques, tous les ateliers de céramiques du bourg et même visité le musée de la céramique dans l’ancien château des évêques de Tarente.


Tout un comité d'accueil.

 Les pièces peuvent être polychromes ou, comme ici, monochromes et servir à différents usages.

Une des bonnes fabriques de céramiques qui sait mettre de l'avant sa production.


Dans leur cas, l'artisanat et devenu art magnifique.
Allez visiter leur site pour voir leurs belles réalisations.
L'Autre aurait bien aimé en rapporter une, mais celles-ci, selon lui,
étaient nettement trop chères pour sa pauvre petite bourse.
Et moi de lui dire : "Vraiment ? Tu sais l'art n'a pas de prix."


À La Terre enchantée, les oiseaux sont colorés...

... on y trouve même une ménagerie bigarrée.


Autres variantes ou déclinaisons de l'inspiration locale.


Faites le focus à la bonne place...et vous verrez que le cavalier porte un sombrero !?!
L'art de la rue s'invite aussi à Grottaglie...


... et ce de différentes formes et sur des supports variés.

Belle porte.

Entrée du musée et tapis bleu pour les invités de marque que nous étions,
du moins nous le pensions, car L'Autre et moi étions les seuls visiteurs.

Beau plafond peint dans une des salles d'exposition.


Zèbres et girafes au baobab et Pichet pour limonade ou limoncello.


Très beau glacis pour cette urne avec anses.


Aquarium de table de Liguori Pasquale.

Œuvres ou installations d'inspiration plus contemporaine. 

C'est bien joli, mais à quoi cela peut-il bien servir ?

 Pour servir une entrée de sardines accompagnées d'un bon vin et
une jarre à huile vernie qui de la personnalité.


Coquelet porte bonheur, une production typique de Grottaglie...

... on en trouve dans une grande variété de couleurs et de tailles,
dans toutes les boutiques... et même sur les toits.


Encore une journée bien remplie !






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